Le trouble de l’attention chez l’adulte
Le trouble de déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité était réservé aux enfants et aux adolescents. Mais, depuis la pandémie, les diagnostics et les traitements par stimulants éclatent chez les adultes. Que se passe-t-il ? Il s’agit d’un «trouble du neurodéveloppement qui associe, selon des combinaisons variables, un déficit de l’attention, une hyperactivité motrice et une impulsivité marquée» (L. Niosi, Québec Science, octobre-novembre 2024).
Il affecte 5.9 % des jeunes et maintenant 2.5 % des adultes. L’héritabilité du trouble est à 75 %. Longtemps, il a été estimé que les troubles diminuaient et même disparaissaient avec l’âge. En fait, lorsque le cerveau rattrape son retard de maturation, cela est vrai pour environ 50 % des cas.
La prévalence aux États-Unis a augmenté de 123 % entre 2007 et 2016 et les diagnostics chez les adultes ont augmenté quatre fois plus vite que chez les jeunes. Au Québec, La Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) a remboursé des médicaments pour traiter le TDAH à 79 040 adultes en 2023 comparativement à 59 142 en 2019. Il s’agit d’une augmentation de 34 %.
Aux États-Unis, les prescriptions chez les adultes de 20 à 39 ans pour le TDAH ont crû de 30 % pendant la pandémie de COVID-19. «Trois quarts des adultes ayant récemment reçu un diagnostic affirmaient y avoir été incités par la pandémie. Parmi les facteurs évoqués : anxiété liée au virus et aux mesures de confinement, travail à la maison avec nouvelles sources de distraction, et temps accru passé sur les médias sociaux» (Ibid.).
Aux États-Unis, de 2020 à 2022, le nombre de femmes diagnostiquées TDAH a doublé. Les femmes ont souvent l’inattention, beaucoup moins l’hyperactivité, l’agitation ou l’opposition. Le diagnostic les rattrape lorsque les responsabilités s’accumulent (emploi, charge mentale liée aux tâches quotidiennes et aux enfants). L’attention partagée est mise à rude épreuve. Le diagnostic est alors porté.
Il est maintenant connu que les règles, le post-partum ou la ménopause peuvent empirer les symptômes et diminuer l’efficacité des médicaments.
Il ne s’agit pas d’une mode. La Dr Annick Vincent, psychiatre, neuropsychologue et spécialiste du trouble depuis plus de 25 ans, affirme qu’il y a eu une forme de rattrapage. Le TDAH doit être différencié de l’anxiété et de la dépression. Le DSM-5, Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux statue qu’«un certain nombre de symptômes persistants doivent être présents depuis l’enfance dans au moins deux contextes différents (à la maison et au travail, par exemple) et doivent perturber considérablement le fonctionnement» (Ibid.)
Ne pas traiter le TDAH n’est pas anodin. Car le parcours de vie peut être chaotique dans les sphères scolaire, familiale, professionnelle et sociale. Il y a un risque accru de dépressions, de grossesses non planifiées, de tentatives de suicide. Les automobilistes ont trois fois plus de risque d’avoir un accident. Dans la population carcérale, les adultes TDAH sont surreprésentés.
Le traitement est pharmacologique et nécessite un suivi multimodal (thérapie cognitive et comportementale ou interventions psychoéducatives avec des travailleurs sociaux ou des ergothérapeutes). Du moins idéalement, ce qui est difficilement le cas.
Billet # 325